Maissiat rouvre son Coeur Fragile dans un pur moment de poésie
On l’avait découverte avec Tropiques en 2013, puis retrouvée avec Grand amour en 2016. Maissiat revient sept ans après. Sept ans d’écriture et de com-position ininterrompues durant lesquels l’interprète a également exploré des chemins de traverse comme autant d’affluents dont son nouvel album Delta est l’aboutissement.
À l’issue de sa tournée Grand Amour : un déclencheur. À l’invitation de la Mai-son de la poésie de Paris, Maissiat imagine une lecture musicale dans laquelle correspondent ses carnets de bord, ses chansons et ses textes de chevets. Cette forme scénique donne un autre relief à son répertoire et la révèle comme une lectrice hors du commun. S’en suit en 2018 une carte blanche d’une saison au cours de laquelle elle crée plusieurs lectures musicales inédites. Pendant plus d’un an, Maissiat donne voix à des auteurs majeurs pour elle (Sophie Calle, Françoise Sagan, Goliarda Sapienza, Marguerite Duras et Alain Bashung), écri-vant pour chacun un spectacle à part entière
Une seconde voie s’ouvre en 2020 : celle qu’on avait découverte chanteuse puis lectrice se révèle sous nos yeux comédienne dans Dabadie ou les choses de nos vies, spectacle musical créé et interprété au côté de Clarika et Emmanuel Noblet.
Portée par les mots des autres, le désir d’écrire pour soi ne la quitte toutefois pas. Maissiat consigne chaque jour le réel et le temps qui passe dans ses car-nets de bord. Elle commence l’écriture de nouvelles chansons, assume de pren-dre le temps et de l’utiliser comme une matière qui façonnera chacune d’elles.
C’est forte de tous ces croisements et de cette écriture au long cours qu’elle revient aujourd’hui avec Delta, un disque affranchi dont elle signe la mise en son et la mise en scène, comme les deux pôles indissociables d’un même monde.
C’est donc un album qui n’a pas peur d’être franc. Pas peur de laisser le piano, seul au centre du cadre, reprendre le fil du récit, le temps d’un splendide instru-mental (Filles du Vésuve), comme pour permettre à la voix de se remettre du courage qu’il y a à dire les choses. Pas peur non plus d’affronter les faux-semblants et combien il est exigé en société que nous sauvions les apparences (Sur la ligne blanche), ni de reconnaître sa vulnérabilité face à un monde intrai-table (Cœur fragile). Pas peur, surtout, de regarder en face l’horizon d’une re-naissance. Après la noyade : la nage retrouvée (Si c’est aimer). Pas peur, enfin, de souhaiter aux disparus un bel « après ». Ni de se tourner à nouveau vers d’autres passions : l’amie, l’ami, la chère tribu, le public (Comme jamais).