Nuits de Fourvière – Ben Howard – Live Report
« Now I’m older
I don’t look over my shoulder
I know what is there in front of me
Ten Marlboro cigarettes
The rolled butts into the bottles
Today I will stare at the sea
Till my eyes have had enough » Ben Howard – Nica Libres At Dusk
Ces quelques lignes qui viennent conclure le morceau Nica Libres At Dusk résument bien l’état d’esprit de Ben Howard et son rapport à la musique : c’est un jeune homme à l’univers à la fois paisible et mélancolique, qui a trouvé sa vocation, sa ligne directrice quant à l’évolution de son art.
Le grand public le découvre en 2011 avec son premier album Every Kingdom (il a 24 ans à l’époque). Grâce à des morceaux phares tels que Old Pine, The Wolves ou Only Love le jeune anglais dévoile les ingrédients qui composent sa musique : une folk alternative douce, rêveuse, qui repose sur ses prouesses de guitaristes et le timbre atypique de sa voix. Au fil des EPs (The Burgh Island en 2012) et des albums (I Forget Where We Were en 2014), son style s’affirme et ses compositions s’étoffent.
En juin 2018 Ben Howard revient sur le devant de la scène avec un nouvel album intitulé Noonday Dream. On reconnaît bien sûr l’ADN de sa musique ainsi que son sens de la mélodie, mais cette fois-ci il expérimente de nouvelles sonorités, enrichit son univers acoustique pour atteindre un degré de production et d’arrangements plus complexe.
On retrouve le virtuose sur scène au festival Les Nuits de Fourvière seulement 1 mois après la sortie de l’album. Live report à chaud !
Ce mardi 3 juillet 2018, la première partie est assurée par Tamino (jeune artiste belge d’origine égyptienne). À mi chemin entre Woodkid et Jeff Buckley sa musique envoûte le public dans une scénographie sombre et enfumée.
22h00 arrive ; place à la tête d’affiche de la soirée. Une ambiance tamisée s’installe dans le Grand Théâtre dès le début du concert au festival des Nuits de Fourvière. Ben Howard prend place sur scène sous les applaudissements. Deux spots s’allument sur le personnage nonchalant, surfer dans l’âme avec son allure échevelée, laissant dans l’ombre le reste du décor.
Assis, sa Fender Jazzmaster sur les genoux, il entame son set par une intro guitare/voix et place tout de suite la soirée dans une bulle de douceur. L’instant d’après des notes de synthé planantes arrivent pour soutenir le leader et lancent le morceau The Defeat. La rythmique part et tous les projecteurs s’allument, dévoilant le reste de la scène en un plateau complexe où rien n’est laissé au hasard.
Pour ce Noonday Dream Tour 2018, pas moins de huit musiciens entourent Ben Howard sur scène. On découvre deux batteries en arrière-plan, cinq claviers dispersés de parts et d’autres, un trio à cordes, un florilège de guitares électriques et acoustiques qui défilent tout au long du concert. Presque tous multi-instrumentistes, les membres du groupe changent leur matériel pour chaque morceau du set : tous les synthés, toutes les guitares, ont une sonorité, un accordage différent. Musicalement et techniquement tout est millimétré, réglé dans les moindres détails. La scène se transforme alors en une sorte de laboratoire expérimental où Ben Howard pose tranquillement ses arpèges, son timbre de voix profond et embrumé.
À seulement 31 ans, le jeune anglais a déjà bien mûri et nous propose un univers indie folk complexe et recherché. Pour jouer son nouvel album Noonday Dream en live, il électrifie ses guitares, ajoute des touches d’ambient music et des influences électroniques à ses arrangements.
Sur scène l’artiste voit les choses en grand et n’hésite pas à déployer tous les moyens nécessaires aussi bien pour le travail du son que pour la scénographie. Les projecteurs gravitent autour de poteaux disposés sur la scène pour changer l’ambiance lumière morceau après morceau. Au dessus du groupe flottent de grandes toiles blanches sur lesquelles sont projetées différentes ambiances et atmosphères. Le visuel présente des textures à l’image des chansons : des flammes qui crépitent, des ombres d’oiseaux, des gouttes de pluies qui glissent sur une fenêtre, des paysages tantôt urbains, tantôt spatiaux …
En soi, tout ce qu’un auditeur peut imaginer s’il ferme les yeux et se laisse transporter par la musique.
Au cours de la soirée, Ben Howard nous présente l’intégralité de ses nouvelles compositions : Murmurations et ses nappes de synthés aériens, Someone In the Doorway et sa progression intense, A Boat To an Island On the Wall et son atmosphère feutrée. Sur Towing the Line il utilise une voice box pour mixer sa voix en live et y appliquer des effets oniriques qui magnifient la mélodie mélancolique du morceau.
Towing The Line et ses effets vocaux sureprenants.
Devant un public apaisé, il sort de sa bulle un instant et lâche avec un sourire timide « You look so beautiful tonight » avant d’entamer What the Moon Does. Concentré, il s’exprime peu mais sa musique parle pour lui.
Au milieu du concert, le morceau All Down the Mines sonne comme une brève parenthèse aux influences country et bluegrass. La façon dont Ben joue de ses guitares s’inspire du picking et des techniques propres à la musique traditionnelle américaine.
En fin de set l’auteur-compositeur revient à ses premiers succès. Le public est comblé lorsqu’il entend les premières notes bluesy de Small Things et la ballade folk rock I Forget Where We Were.
Avant de quitter la scène il joue également Nica Libres At Dusk, morceau phare du nouvel album à l’univers poétique et rêveur.
Sous l’applaudissement général de la foule Ben revient pour un rappel composé de 3 morceaux. Confirmant son statut de virtuose de la guitare, du chant et de l’écriture, il conclut avec There’s Your Man du nouvel album puis End of The Affair et Conrad, d’anciens morceaux aux harmonies élaborées.
Il quitte alors la scène du Grand Théâtre à l’issu d’un live d’une grande profondeur : ce soir aux Nuits de Fourvière, Ben Howard nous a livré une performance d’une grande richesse émotionnelle et musicale…
Crédits photos : ASB Photographie
Auteur : Julien Portenguen
Un commentaire sur “Nuits de Fourvière – Ben Howard – Live Report”