Réunion de famille avec Jon Batiste et Trombone Shorty pour l’ouverture du MJF (05.07.24)
Ça y est, c’est le moment tant attendu de la saison estivale…
Ce vendredi 05 juillet, le Montreux Jazz ouvre ses portes aux festivaliers. Cet été encore, on a le privilège de vous partager toute la richesse de ce festival de légende.
Pour cette édition 2024 un peu particulière, les équipes du Montreux Jazz nous régalent avec une programmation toujours aussi variée qui pourra satisfaire tous les amoureux de musique.
Comme d’habitude, tous les styles sont représentés, et tous les artistes trouvent leur place à Montreux. Des shows blockbuster de vieilles légendes, des énormes têtes d’affiche actuelles, des concerts plus alternatifs, d’autres plus intimistes, des groupes locaux… Aucun acteur du paysage musical n’est délaissé et le Montreux Jazz Festival devient, pendant deux semaines, le sanctuaire de l’expression artistique sous toutes ses formes.
Mais alors qu’est-ce qui change cette année ?
Le 2M2C est en rénovation, ce qui veut dire que l’Auditorium Stravinsky et le Jazz Lab – les deux salles qui accueillent d’habitude les concerts payants – sont hors de l’équation.
Pour cette édition 2024 le MJF a dû faire peau neuve, et pour ce faire, il va puiser dans son histoire. Cette année les concerts se dérouleront dans deux endroits mythiques des éditions précédentes, que les festivaliers n’avaient pas vu depuis un moment.
- D’abord la scène du Lac, qui fait son grand retour après sa dernière apparition en 2021. Le public aura donc le plaisir de se rassembler sur la Place du Marché de Montreux, devant une scène XXL construite sur l’eau. Avec bien sûr une vue imprenable sur le paysage à couper le souffle de la Riviera et les couchers de soleil sur le Léman.
- Ensuite la scène du Casino, emblème de l’histoire du Festival. Ici repose les fantômes des concerts mythiques de Nina Simone, Miles Davis, Marvin Gaye ou encore de l’incendie qui inspirera Smoke On The Water de Deep Purple (d’ailleurs à l’affiche cette année). Le Casino est un écrin plus intimiste avec des places limitées, pour une expérience d’écoute au plus près des artistes.
La partie gratuite du festival quant à elle continue son expansion au fil des années.
Avec ce nouveau dispositif, le parcours le long des quais de Montreux a été repensé. Cette année il s’étend sur une plus grande surface et quelques scènes ont été déplacées. L’offre est tout simplement hallucinante : concerts, dj sets, jam sessions, workshops, projections… Au total plus de 500 activités gratuites sur 15 lieux différents.
Peu importe où et quand, il y a toujours une expérience unique à vivre au Montreux Jazz Festival.
Pour ce premier soir tant attendu, on a rendez-vous à la Scène du Lac avec une soirée d’ouverture 100% New Orleans pour commencer en fanfare !
Au programme, deux artistes habitués du MJF : Trombone Shorty et Jon Batiste. Les deux compères se connaissent depuis leur plus jeune âge et ont depuis travaillé ensemble à de nombreuses reprises (notamment en 2022 sur l’album We Are de Jon Batiste, élu album de l’année aux Grammy Awards).
La soirée revêt donc un parfum de réunion de famille… Et l’ambiance promet d’être électrique, car ces deux artistes représentent l’ADN de la musique festive et communicative de la Nouvelle-Orléans.
Sur la Place du Marché, on se fond dans la masse des festivaliers quelques minutes avant le début du premier concert. Sur le balcon proche du podium ouest, on aperçoit Mathieu Jaton, le directeur du festival, qui contemple une dernière fois son œuvre avant de venir lancer les hostilités.
On le retrouve sur scène au micro pour un speech d’ouverture clair et concis : en ouverture du festival, la Nouvelle Orléans s’empare des rues de Montreux pour une soirée sous le signe de partage et de fête.
Début de soirée tonitruant avec Trombone Shorty
Troy Andrews a commencé sa carrière musicale à l’âge de 6 ans en jouant du trombone et de la trompette dans les fanfares de la Nouvelle Orléans. D’où son nom d’artiste,Trombone Shorty, le petit qui joue du trombone.
Aujourd’hui il a bien grandi, et du haut de ses 38 ans, c’est l’un des musiciens les plus reconnus de la scène New Orleans.
Une douzaine d’albums à son actif, une liste de collaborations longue comme le bras, et un Blues Music Award du meilleur cuivriste en 2018… Une carrière bien remplie donc, et ponctuée par 4 apparitions au Montreux Jazz Festival.
Ce soir, Trombone Shorty est de retour pour un 5ème concert et il débarque sur la Scène du Lac avec ses traditionnelles lunettes de soleil vissées sur le visage.

Il est accompagné par son groupe Orleans Avenue, remonté à bloc pour commencer le set.
On découvre la formation qui va débuter la soirée. Ils sont 8 à s’installer : basse, batterie, deux guitares, un sax’ ténor, un baryton, une choriste, et Trombone Shorty lui-même qui s’occupe du chant lead, de la trompette et du trombone.
Le concert commence par le morceau It Ain’t No Use et donne le ton du concert : une énergie brute et survoltée qui ne fera qu’augmenter tout au long du show.
Le son live est à l’image de Lifted, dernier album de Trombone Shorty sorti en 2022 : une fusion parfaitement équilibrée entre rock, funk, soul, jazz et hip hop !
Après un début tonitruant Shorty demande au public de Montreux “Are you ready to go crazy ?”. Il répond lui-même par l’affirmative en interprétant une reprise de Let’s Go Crazy de Prince. Apparemment tout le monde est prêt.
À travers son set, le musicien explore toute sa discographie depuis ses débuts avec des arrangements musclés qui tendent vers la funk et le rock.
À la moitié du concert l’ambiance atteint son apogée avec On The Way Down, le tube de son tout premier album. C’est l’occasion pour Jon Batiste de venir faire un coucou à son vieux pote et au public du haut du balcon ouest. On assiste à une communion entre les deux artistes et leurs fans.
Mention spéciale aux membres du groupe Orleans Avenue qui se partagent le travail pour ne laisser aucune minute de répit au public. Entre les solos de Les Paul saturés de Pete Murano, les interventions remarquables des deux saxophonistes et les vocalises de la diva soul Tracci Lee Jordan, on ne sait plus où donner de la tête.
Mais le leader c’est Trombone Shorty et il a plus d’un tour dans son sac.
Avec son jeu de scène bondissant, il habite toute la scène, et va danser tour à tour avec tous ses musiciens. Il maîtrise le groove de sa voix chaude à la perfection et montre l’étendue de son flow lorsqu’il rappe le refrain de Give It Away des Red Hot Chili Peppers sur une outro déchaînée.
Côté instruments, il enchaîne les solos de trompette et de trombone morceaux après morceaux et démontre qu’il a des poumons taillés pour le job. L’heure est à la démonstration technique lorsque Shorty balance sa signature live : une note de trombone tenue à l’infini sous les yeux ébahis du public et de ses musiciens qui n’en reviennent pas.
Vous voulez du spectacle ? En voilà.
Pour terminer en beauté, Trombone Shorty et ses deux cuivres descendent se balader dans le public pour s’offrir un moment authentique avec les spectateurs. C’est comme ça que se transmet la musique à la Nouvelle Orléans, et la star n’allait pas quitter Montreux sans partager sa musique au cœur même de la foule.


C’est la fin du concert, et Trombone Shorty nous quitte. Mais ce n’est que le début de cette ambiance de fanfare New Orleans car on en connait quelqu’un d’autre qui partage ce savoir-faire.
Jon Batiste, un artiste en quête d’universalité
L’été dernier, Jon Batiste avait élu domicile à Montreux pour un mois de vacances avant de nous gratifier d’un concert inoubliable. Doit-on encore présenter ce pilier mondial de la musique soul ? Depuis les dix dernières années, le showman a tout vu, tout fait, tout raflé. On vous invite à relire l’article de l’année dernière pour vous rafraîchir la mémoire et on enchaîne tout de suite par le débrief’ du concert de ce soir.
Vous l’avez compris, entre le MJF et Jon Batiste, c’est une véritable histoire d’amour. Une histoire de famille. L’artiste est chez lui, ici à Montreux, et offre encore l’exclusivité au festival pour sa seule date européenne cet été.
Dans la continuité directe avec son show de l’année dernière, on est curieux de voir l’évolution artistique de cet homme solaire, toujours animé d’une joie communicative.
Cette évolution, on a d’ailleurs déjà pu l’observer. Un mois après sa performance de 2023 au MJF, Jon Batiste sortait un nouvel album intitulé World Music Radio. Difficile de faire mieux que son précédent album, We Are, qui faisait figure d’hommage et de manifeste pour la musique noire américaine.
Mais Jon Batiste continue de surprendre avec un nouveau projet ambitieux. Tout est dans le titre World Music Radio. Ce concept album prend la forme d’une diffusion radio qui rassemble l’humanité de demain autour d’une seule et même musique qui se veut universelle. Pour créer cet univers, l’artiste a dessiné une fresque musicale foisonnante qu’il vient nous présenter ce soir à l’occasion d’un live exclusif.
Le concert commence donc à l’image de l’album avec une bande son de jingle de radio pendant que les musiciens s’installent. Jon Batiste débarque en costard doré à paillettes, sa telecaster sur l’épaule, et le show commence en trombe avec deux énormes tubes de l’album We Are : d’abord le morceau très rock Tell the truth avant d’enchainer par la masterclass soul et gospel qu’est Freedom.

Ce n’est qu’après cette intro qu’on va découvrir les nouvelles expérimentations de Jon Batiste.
En effet, les morceaux de World Music Radio sont novateurs et vont chercher des sonorités futuristes. Tout au long du set on a le droit à de nombreux habillages électroniques et autres ambiance sonores robotiques qui explorent de nouveaux horizons. L’artiste enfile le casque de science-fiction qu’il arbore sur la pochette du nouvel album. Il devient l’antenne qui diffuse son nouveau message.
Premier pas vers l’universalité : tous les styles sans exception se rencontrent dans la musique de Jon Batiste. Le compositeur s’affranchit des barrières entre les genres et les mélange avec la virtuosité qui le caractérise.
Les nouveaux morceaux Be who you are et Raindance prennent des accents de reggae et de world music caribéennes. En live, la rythmique de guitare claque sèchement sur le contre-temps !
Tout au long du set, le tuba et le saxophone respirent le jazz de la Nouvelle Orléans. La choriste fait trembler la Scène du Lac avec sa voix soul. La basse est tantôt funky tantôt bluesy. Le batteur nous envoie une petite danse country sur le devant de la scène avec son tambourin… Jon Batiste s’offre un moment de douceur piano voix où il montre aussi ses talents de pianiste classique sur la chanson Butterfly. On vous l’a dit… Tous les styles se rencontrent dans sa musique fédératrice.
Deuxième pas vers l’universalité : Jon Batiste ponctue le concert de moment de communion avec son public et ses proches. À plusieurs reprises, il prend des pauses entre les morceaux pour entonner avec son mélodica des mélodies connues de tous.
À chaque fois on reprend en chœur. D’abord les quelques notes entêtantes de sa chanson Worship puis les fameux “Oh when the saints go marching in” ou “If you happy and you know it clap your hands”…
On souhaite aussi “Happy birthday to you” à sa femme Suleika. Puis on enchaîne avec “You are my sunshine my only sunshine” et “On the sunny side of the street”…
À travers ces interludes, le message de Jon Batiste se dessine sous nos yeux ce soir : la musique est une joie universelle à partager, elle nous rassemble et nous connecte les uns aux autres.
Et comme le veut la tradition…
Pour terminer le concert, le showman et son groupe descendent jouer dans le public pour s’offrir un bain de foule et propager la joie communicative qui déborde de leur musique.
En bon messager, Jon Batiste scande : “Ce soir c’est une affaire de famille”
Les spectateurs profitent encore une fois de la véritable ambiance des marching band de la Nouvelle Orléans.
Tout le monde emboîte le pas au groupe, et cette grande fête ambulante sillonne les rues de Montreux jusqu’au Fairmont Palace. Jon Batiste salue sa grande famille montreusienne avant de se retirer au terme d’un concert d’anthologie.


Mais avec ces mecs-là, la fête n’est jamais finie…
Une jam session explosive jusqu’au bout de la nuit
Les habitués du MJF savent qu’après les concerts, il ne faut pas manquer les jams sessions qui se tiennent dans l’enceinte du Memphis Bar, au rez-de-chaussée de la Lake House.
Là-bas, on boit un verre pour discuter du concert, on échange avec des musiciens de la scène locale, mais aussi ceux du monde entier que le festival attire.
De 22h à 4h00 du matin on a l’occasion de monter sur scène pour jammer, ou tout simplement observer le spectacle.
Je jamme un moment, sors de scène et m’installe sur un canapé pour discuter avec les musiciens de ce soir. Il est 3h, Trombone Shorty et Jon Batiste arrivent accompagnés de leurs musiciens. Avant d’aller jammer à leur tour, ils prennent le temps d’échanger un moment avec les musiciens qui leur laissent la scène.
On discute brièvement avec un Jon Batiste tout sourire qui ne redescend pas de son nuage :
– Merci pour le concert Jon, c’était incroyable.
– Mec, j’ai pris tellement de plaisir, t’imagines même pas !
– Oh si j’imagine, ça se voit à ta tête.
S’ensuit une jam explosive dans une ambiance complètement débridée…
Jon Batiste prend les claviers, Trombone Shorty chauffe la salle à blanc au chant lead puis termine à la batterie. La choriste de Jon Batiste fait alors le show jusqu’au bout de la nuit. On a l’impression d’être dans un club de la Nouvelle Orléans un soir de Mardi Gras.
Une vraie claque… Le genre d’expérience qui ne se vit qu’au Montreux Jazz Festival !
Crédits photos : Lionel Flusin, Emilien Itim, Marc Ducrest, Anna Francesca
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