AUDEL X’TET – Comment La Musique Trap Rajeunit La Musique Jazz (Interview)

L’exacte même mélodie conte encore les souvenirs intactes d’une nuit passée en Tunisie

L’éclat de légendes jamais ne décline, et les âmes de Diz & Bird les âges défient.

Riche et vivace est le jazz, en constante évolution, de générations en générations.

C’est avec une émouvante sensibilité que Kenny Audel et sa formation AUDEL X’TET proposent un arrangement live du standart Night In Tunisia, hautement inspiré de Dizzy Gilepsie et Charlie Parker, aka Diz & Bird.

Ce live arrange reflète fidèlement l’énergie initiale de ce morceau. Les notes aux claviers sont jouées avec délicatesse, et progressent vers des variations rythmiques de plus en plus fougueuses et impétueuses, donnant ainsi une nouvelle jeunesse à l’oeuvre originale.

Enrichissant cette pièce de nuances neo-soul et hip hop, Kenny redonne de nouvelles couleurs à la musique jazz, et se revendique du genre du trap jazz.

Ce mot prend tout son sens lorsque Keykah Audel, chanteuse du groupe, élève sa voix au moment de la dernière variation, sur un fond de synthétiseur en décor. Suivant lacadence battue au pad électronique, elle s’envole sur des harmonies gospels joués à l’orgue, avant de ré-atterrir sur les notes d’un piano jazz.

Plus qu’une musique, le jazz est une tradition, une histoire lourde de sens pour le peuple noir, comme évoqué lors d’une interview avec Emanuel Harrold, entre autres batteur de Gregory Porter.

Commémorer cet héritage et en perpétuer la transmission dans la musique actuelle, c’est une mission que l’AUDEL X’TET accomplit sans faillir.

Au cours de l’interview qui suit, Kenny nous explique sa vision du trap jazz et comment moderniser le jazz.

INTERVIEW 

SSB : Pour Night In Tunisia, de quelle version êtes-vous partis ? De celle de Miles Davis, Ella Fitzgerald, ou bien plutôt Dizzy Gilespie ?

AUDEL X’TET :  Dizzy feat Bird of course! Je penses que c’est important, avant de revisiter et retravailler une oeuvre quelconque d’écouter l’esprit de l’auteur, de plus il y a une telle énergie dans cet enregistrement…

Cerise sur le gâteau en écoutant attentivement j’ai découvert que le rythme joué par Roy Haynes (cf disque Legends of Masterpiece) de  0’06 » à 0’16 » sonne vraiment Hip Hop. Je trouve ça incroyable!

Je termine donc l’arrangement avec  « Jah » Boristhene qui reprend, en partie le même motif en beatbox, comme un passage de témoin à 7’49.

SSB : Pourquoi avoir choisi ce standart ?

AUDEL X’TET : Un standard mais lequel… Ce standard était un véritable tube a l’époque, le genre de tube à faire danser les gens de plus.

J’ai eu l’occasion de jouer mon « live arrange » avec l’un des  batteurs de Dizzy Gillespie, — Sangoma Everett à Jazz a Vienne—me disant que Dizzy l’aurait vraiment apprécié, il y a une énergie incroyable dans ce morceau qu’on se devait de retransmettre. Ceci ajouté au rythme hiphop joué par Roy Haynes… il n’y avait plus trop de débat… On comptabilise environs 5000 vues en un mois pour notre premier clip sur Facebook.

Clairement, ce projet n’a pas vocation à reprendre des standards de jazz mais pourtant… #TrapJazzIsTheNewJazz, le but était de faire le buzz avec un standard de jazz — et garder le lien avec notre communauté de jazz(wo)men— tout en communiquant nos influences Gospel, Hip Hop, Soul caribéenne.

SSB : Qui a réécrit les paroles ? Que souhaitiez-vous exprimer et raconter?    

AUDEL X’TET : Pas moi en tout cas, mais elle nous plonge dans l’univers de Dizzy & Bird en passant par ceux de John Coltrane & Steevie Wonder.

Les paroles parlent d’elles même. On se rend compte en réarrangeant ce standard que la mélodie n’a pas perdu une ride, il fait toujours danser les gens aujourd’hui. Les paroles expliquent comment ce standard à su trouver écho dans les coeurs des diverses générations de Coltrane a Steevie…

AUDEL X’TET aujourdh’ui se définit comme l’exprime si bien les paroles « The torch is lit we keep the flame and the melody remains the same ».

SSB : Comment definisez-vous la trap jazz ? Pour vous, qu’apportent ces Nouvelles influences au jazz ?

AUDEL X’TET : #TrapJazzIsTheNewJazz: Le trap Jazz est le renouveau et la continuité du jazz! J’aime jouer avec le temps, l’étirer à souhait… le groove du trap est chill, il s’y prête vraiment.

Le Jazz est une musique très riche harmoniquement et protéiforme, capable d’absorber des influences de divers styles musicaux.

J’utilise le trap pour rajeunir, rafraîchir et rendre accessible le jazz à bon nombre de personnes. Le trap est l’une des formes d’expression musicale revendicative de la black music, tout comme je jazz le fut en son temps, « Now I’m free! ».

Jazz et trap sont tous deux originaires du sud des Etats Unis au sein des communautés afro-américaines. Musicalement ou du moins instrumentalement ainsi que culturellement je crois que le hip hop rap ou trap de France s’appauvrit… heureusement le jazz est riche! Par opposition, on entend aujourd’hui du trap de partout même dans des pub pour…

SSB : La musique trap peut avoir une connotation assez obscure en contraste à votre message Gospel, plus lumineux. Qu’est-ce qui a motive une telle association.

AUDEL X’TET : Je ne dirais pas spécialement obscur mais dur, certains diront  » thug ».

Le trap est une musique de combattant de gladiateur, si le trap existait à l’époque des combats de l’arène, ça serait certainement leur musique d’entraînement !

Quand on joue de la musique on n’est ni riche, ni pauvre, ni noir, ni blanc tout comme avec le spirituel. Dans notre musique, on parle de la vie qui est un combat, combat parfois très dur, tout aussi dur que les choix que nous sommes amenés à faire de part notre existence sur Terre.

Ce côté dur est retransmis par le trap : la vie, ses conséquences, pardonner, la vérité parfois toute aussi dure à accepter…

Il y a aussi du Jazz qui contribue à colorer nos compositions, ces couleurs dès lors qu’elles s’associent aux paroles étoffent notre message de vie, de foi et d’espoir : l’opportunité de repartir à zero et de tout recommencer, balayer la vie passée.

C’est un combat de tous les jours qui dit combat dit trap music. Comment? en écoutant notre prochaine compo « Look at the Sky » (Spoil)

Pour finir, il y a cet artiste Sha-D, certainement un artiste avec lequel j’aimerais un jour collaborer, très connu dans les west indies et en métropole comme chanteur de trap, il chante maintenant, comment lui est sorti des « Bendo »… toujours sur de la trap music indeed!

Je crois que la fatigue de la neo soul, l’envie d’autre expérimentations, d’explorer plus loin que le hip hop m’ont définitivement motivé et convaincu !

SSB  Connaissez-vous Chris Moten ? Si non, qui sont vos sources d’inspiraton pour associer musiques trap et jazz ?

AUDEL X’TET : In first God, of course! Ensuite Keykah, chanteuse de jazz et de Gospel : sa voix et son flow m’inspire, elle a le don de communiquer et ne pas laisser indifférent quiconque l’entend chanter. Pour finir Sha-D,

En ce qui concerne l’association musique trap et jazz, c’est simplement ce que j’entends dans ma tête, ces harmonies et ce groove  papillonnant dans mon crâne. Je crois que Dieu m’inspire day after day. Tks God!

Je ne connaissais pas Chris Moten, après écoute je dois avouer ne pas me reconnaitre dans ce que j’ai pu écouter sur youtube. Pour moi le Jazz sert à casser la monotonie que l’on peut parfois retrouver si l’on écoute —pendant 5 bonnes minutes— une instru trap sans chanteur!

 SSB : Enfin, à quelle occasion peut-on vous voir sur scène ?

AUDEL X’TET : Le 10 mai, le AUDET XTET [a mis] le 🔥pour la commémoration des 170 ans de l’abolition de l’esclavage !

C’est  une cause qui me tient énormément à cœur, je suis originaire des Antilles certes mais descendant du vieux continent.

Je crois pouvoir dire que c’est grâce à des individus courageux que nous pouvons aujourd’hui jouir du droit de nous exprimer librement et musicalement, il faut être reconnaissant et continuer à aller de l’avant. Pour les autres dates il suffit de liker notre page Facebook AUDEL XTET!